Par-delà nature et culture

Le monde selon Philippe Descola

L’anthropologue Philippe Descola propose dans Par-delà nature et culture une classification des différentes manières dont les sociétés humaines perçoivent et organisent leur relation avec le monde. Il identifie quatre ontologies (ou catégories de pensée) qui structurent ces rapports :

1. Le naturalisme

  • Typique des sociétés occidentales modernes.
  • Séparation entre nature (régie par des lois physiques et biologiques) et culture (spécifique aux humains).
  • La science s’appuie sur cette distinction pour étudier le monde.

2. L’animisme

  • Présent chez de nombreux peuples autochtones (Amazonie, Sibérie, …).
  • Tous les êtres (humains, animaux, plantes, esprits) ont une même intériorité (âme, subjectivité), mais des corps différents.
  • Communication possible entre les humains et les non-humains.

3. Le totémisme

  • Fréquent dans certaines sociétés aborigènes d’Australie.
  • Regroupe certains humains et non-humains dans des clans totems partageant des caractéristiques communes (exemple : un groupe lié à un animal totem).
  • Continuum entre nature et culture.

4. L’analogisme

  • Présent dans des traditions chinoises, africaines ou méso-américaines.
  • Le monde est perçu comme fragmenté en éléments distincts, mais reliés par des correspondances (exemple : astrologie, médecine traditionnelle chinoise).
  • Les humains doivent réorganiser ces liens pour comprendre et agir sur le monde.

Cette classification remet en question l’idée occidentale que la séparation nature/culture est universelle et invite à repenser nos rapports au vivant.

critique sensitive

J’admets ne pas avoir été séduite par cette catégorisation du monde, évidemment poreuse, artificielle, cloisonnée, et elle-même suis generis issue d’une matrice « naturaliste ». En quelques mots, d’emblée …. Descola, s’inscrivant dans une catégorie occidentale qu’il définit comme naturaliste, admet son « état situé », et par conséquent admet la « construction située » de ses catégories.

Une autre critique majeure que j’ose formuler est, en conséquence, ces catégories sont-elles des manières de pensée innées ? structurelles? Ou des modes de fonctionnement du cerveau humain? Une intelligence analogique, naturaliste, « totémiste » ou/et « animiste », des modes de penser la Terre. Une catégorisation versus une association, une pensée exofuge, séparatrice versus une pensée centrifuge, aglomératrice (l’adhérence primordiale décrite dans le Saint Coran).

Mon mode de penser est assurément principalement analogique et Philippe Descola est trop naturaliste à mon goût. Un danger de l’analogisme est d’écarter du rhizome le superflu (considéré comme tel par le rhizome, évidemment), et une certaine addiction pour le relativisme. A priori, un danger du naturalisme est la différenciation, et donc la hiérarchisation, mais ses catégorisations le protègent de l’oubli : tout est rangé, à sa place.

Les formes du visible

« aboutissement d’une succession dont l’enchaînement est le fruit des circonstances.

Le monde perçu comme fragmenté en éléments distincts des « analogistes » me paraît aussi une idée trop occidentalisée : cette catégorie, en MésoAmérique, pas forcément pertinente.

Qu’en penses-tu ? Bayardo Gamez?

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