Hayao Miyazaki, réalisateur des mangas les plus célèbres du XXe siècle, est souvent considéré comme un écologiste avant l’heure en raison des messages environnementaux omniprésents dans ses films. Ses œuvres mettent en lumière la relation entre l’humain et la nature, dénoncent la destruction des écosystèmes et plaident pour une harmonie entre progrès et respect de l’environnement. Voici pourquoi il est un précurseur de l’écologie dans l’animation :
1. Une nature majestueuse et puissante
Dans les films de Miyazaki, la nature n’est pas un simple décor, mais une force vivante et souvent spirituelle. Forêts luxuriantes, mers infinies, cieux immenses : son animation magnifie l’environnement, renforçant l’idée qu’il doit être protégé. Miyazaki est passionné d’aviation depuis son enfance. Le ciel est partie prenante des histoires, parfois au sens strict, comme dans Le château dans le ciel, où des nuages protègent une île volante peuplée de robots naturalistes.
2. Une dénonciation des ravages humains sur l’environnement
Miyazaki est né en 1941 au Japon, dans la guerre. Comme toute sa génération, il restera marqué par le conflit et les bombes atomiques sur Nagasaki et Hiroshima, et ses impacts toxiques sur la nature er les hommes. Si tous ses films ne dénoncent pas tous la catastrophe climatique, chacun présente de jeunes héros et héroïnes en quête du meilleur d’eux-mêmes ; les mangas de Miyazaki sont aussi des romans d’éducation.
- « Nausicaä de la Vallée du Vent » (1984) montre un monde post-apocalyptique où la pollution a engendré une nature hostile et mutante, tout en offrant une héroïne et une nature cachée qui cherchent à restaurer l’équilibre. Comprendre la nature semble la clef, mais la dichotomie anthropologique nature/culture est encore nette.
- « Princesse Mononoké » (1997), qui oppose la civilisation industrielle et la forêt divine, incarnée par des esprits et des animaux sacrés, est plus ambigüe. La déforestation et l’exploitation des ressources y sont des thèmes centraux, mais la chef d’entreprise oeuvre pour le biens son peuple, et protège les parias ; lépreux, prostituées,…
- « Le Château ambulant » (2004) évoque les ravages de la guerre et de l’industrialisation sur l’environnement, un robot qui protège la nature dans un château ambulant déserté des humains … et donc en paix ?
3. Des personnages engagés pour la nature
Les héroïnes et héros de Miyaazaki sont souvent des figures écologiques incarnées par des enfants ou adolescents :
- Nausicaä comprend la nature et cherche à la guérir plutôt qu’à la combattre.
- San (Princesse Mononoké) lutte pour protéger la forêt contre l’expansion humaine. Mononoké vit avec les dieux de la forêt, et les dieux se meurt alors elle se bat contre les hommes, avec ses dieux loups, sans état d’âme, jusqu’à ce qu’elle rencontre une jeune homme, qui va devenir un trait d’union entre Nature et Culture, Nature et progrès, Humains et dieux de la forêt.
- Ponyo (dans Ponyo sur la falaise) met en lumière la pollution marine et la fragilité de l’écosystème.
Où sont les adultes ? Les parents sont en général absents, ou déconnectés, quand ils ne sont pas les méchants de l’histoire, sauf quand ils sont pirates ou vieillard cocasse ; c’est-à-dire des enfants…
4. Un appel à l’harmonie plutôt qu’au conflit
Contrairement aux récits manichéens, Miyazaki ne diabolise pas les humains. Ses films suggèrent qu’il est possible de coexister avec la nature à condition d’adopter un mode de vie respectueux et durable. Il me semble que la substantifique moelle de son oeuvre réside dans l’amour de soi, des proches, du rêve éveillé, de la nature. Mon voisin Totoro est sans doute La Parade de Jacques Tati ; l’imagination au pouvoir !
5. Un engagement personnel
Au-delà de son œuvre, Miyazaki applique ses principes dans la réalité. Il a financé la reforestation au Japon, milite contre le nucléaire et s’est toujours opposé à une industrialisation excessive du cinéma d’animation. Avec le studio Ghibli, il a pu créer des oeuvres personnelles et prôner l’écologie et la bienveillance comme autant de modèles de résistance et de résilience face au monstre techno-capitaliste sans âme ni coeur… et qui donc n’est pas forcément un robot. Comme Tezuka, avant que ça ne devienne un sujet global, Miyazaki sensibilisait son (jeune) public au respect du Vivant, à travers ses films, faisant de lui un visionnaire en matière de protection de la nature.
6. Un refus de l’intelligence artificielle
En 2024, une petite vidéo fait le tour du monde des aficionados de Miyazaki qui donne son avis sur la création artificielle. Le moins qu’on puisse dire, c’est que le créateur ne la porte pas dans son coeur.